Tu les connais ces écorchés, ces comprimés. Ceux qui échappent à tout et font tout à la fois. Tu sais, ceux qui t’écoutent parler et qui regardent déjà après, et ailleurs. Ceux qui tracent, ne s’arrêtent sur aucun bouleversement, puisque rien ne les transgresse. Ceux qui ne remarquent aucun détail. Les pressés de vivre, pressés par leur propre temps, pressés les uns contre les autres. Ils courent sur leur quotidien mais ne semblent jamais essoufflés. Ils avancent de moitié, en pensant déjà à demain. Les moroses de l’instant présent qui ne s’émerveillent ni face à l’inattendu, ni d’un accident du hasard heureux. Malgré tout, j’aime les observer et les analyser, dans le peu de temps qu’ils laissent d’eux. Je pense parfois qu’avant j’étais comme eux, et je n'en suis jamais bien loin. A contre temps du naturel et de moitié en vie. Ils pensaient vivre des choses exceptionnelles avec des personnes remarquables, mais ils n’y étaient pas. Le rythme biaisait leur réalité. Mais c’était beau à voir. Comme l’orage.
J’aurais voulu m’asseoir à toutes les terrasses et continuer de marcher toute la journée. J’aurais voulu boire un café et toutes leurs paroles. Croiser milles connaissances et organiser milles sorties prometteuses, mais n’avoir le temps d’en faire qu’une. Trop d’années étaient passées, trop de personnes étaient parties, occupées, pressées, isolés. Loin et jamais aussi proches à la fois. Comme des agrumes dont on aurait retiré le zeste pour un extraire un jus acide, qu’il fallait boire vite, très vite.
texte Printemps 2021
photo 2016
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